Carrefour

Bienvenue sur mon blogue personnel. Ce journal intimiste dans ses récits et propos exprime un désir de dépassement et d'authenticité.

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Polarsteps


15 octobre |

Éric Plamondon est diplômé de l'Université Laval en 1992 en journalisme et en économie. Il vit en France depuis 1996. Il a 55 ans. Il fait paraître son premier roman en 2011, Hongrie-Hollywood Express, autour de la vie de Johnny Weissmuller qui interpréta au cinéma, Tarzan. Il amorce ainsi la trilogie 1984. La notoriété lui vient avec Mayonnaise en 2012, sorte d'hommage à Richard Brautigan, deuxième volet de cette trilogie qui se termine avec Pomme S qui s'attache à la figure de Steve Jobs et au lancement du premier Macintosh en 1984. La pêche à la truite en Amérique de Richard Brautigan et le Sucre de Pastèque sont ses deux plus grands succès. Ces deux romans explorent les thèmes de l'errance, de l'innocence blessée et de l'attachement aux espaces naturels. La pêche à la truite en Amérique met en scène un couple à la recherche de paysages naturels, loin de l'asphalte et des barres d'immeubles. Sucre de pastèque est une sorte de vision idéalisée de Bolinas, en Californie, avec sa population marginale et artiste. Issu d'un milieu social défavorisé de la côte Ouest, Brautigan trouve sa raison d'être dans l'écriture et rejoint le mouvement littéraire de San Francisco en 1956. Il y fréquente les artistes de la Beat Generation et participe à de nombreux évènements de la contre-culture. En 1967, durant le Summer of Love, il est révélé au monde par son best-seller ; la pêche à la truite en Amérique et est surnommé le dernier des beats. Ses écrits suivants auront moins de succès et, dès les années 1970, il tombe progressivement dans l'anonymat et l'alcoolisme. Dans Mayonnaise, Gabriel Rivages mêle ici son destin à celui de Richard Brautigan. Il part à la rencontre de l'écrivain qui a changé sa vie. Rivages arpente à nouveau la côte Ouest américaine. On passe par l'Oregon où Brautigan a grandi et par San Francisco où il devient écrivain. On croise aussi la grande et la petite histoire. Dans l'Amérique des Sixties, Janis Joplin chante Mercedes Benz et offre son écharpe au futur auteur de la pêche à la truite en Amérique. Celui qui vendait ses poèmes dans Haight-Ashbury devient célèbre. Pendant des années, la poésie le sauve. Souffrant d'alcoolisme et de dépressions, Brautigan se tire une balle dans la tête en octobre 1984 dans sa maison de Bolinas. Il a 49 ans. Les histoires de Brautigan ont toujours une fin étonnante. J'aime le style d'écriture d'Éric Plamondon, fluide et rapide. Ses récits sont des romans historiques, j'adore. Il me disait l'autre jour préférer passer du temps avec des gens qui voient un psy qu'avec des gens qui devraient voir un psy. Il y a deux sortes d'écrivains. Ceux qui ont du talent et ceux qui ont besoin d'une bonne thérapie. J'ai souvent pensé que j'avais du talent, jusqu'au jour où j'ai appris que ma mère n'avait jamais voulu d'enfants et que mon père n'était pas mon père. Comme disait ma grand-mère, on est bien moins misérable à s'intéresser à quelque chose plutôt qu'à rien. La plupart du temps, je n'ai pas envie d'en parler, j'ai simplement envie d'en écrire.

12 octobre |

La poésie n'est pas mon genre premier. Toutefois, elle me permet d'étendre ma créativité par la recherche de mots fracassants. La nouvelle est dans les idées ce que la poésie est dans les mots. En cela révèle mes observations non pédagogiques, mon cheminement, mes expériences.

Amalgame de tendresse. Glauque, la voix transpire. M'asseoir les jours de pluie, stigmatisant les ombres infâmes. Esthète persistant aux couleurs de naître, auréole placardée. Les mots jubilent, fustigent, vacillent. Présence délétère, coriace, déchaînée. Corps célestes atrophiés, censurés. Évitement. La menace est réelle chez les tribuns, l'oracle s'est tu. Les attributs dégénèrent dans une spirale délétère. Colère et mépris, la race se tue. Gronde et vocifère, la jeunesse promise. Gronde et légifère, la jeunesse soumise. Asphalte rompu, terre balafrée. À qui s'adresse mes propos moribonds, ma désuète irritation ? Mon charme se dilate au gré des saisons. Distorsion aiguëe, sombre atmosphère. Abstraction de conscience, la menace gronde, perspicace. Personne ne me frappe, même plus ma gueule. Je cesserai de gémir lorsque j'aurai disparu. Absentation de bouger, de mentir. Cataplasme incolore, insouciant. Attendre qui, quoi, où, comment ?Espérer. Libérateurs, les mots se suffisent à eux-mêmes, pernicieux, calamiteux, sulfureux, généreux.

11 octobre |

Qu'est-ce que le bonheur ? Cette question fut la plus étudiée du temps des philosophes antiques jusqu'à nos jours. Ce fut la question posée lors du café philosophique auquel j'ai participé hier soir. Le bonheur est l'absence de malheur, affirme André Comte Sponville. Je suis heureux, mais pas content. Le bonheur est fugace, je le reconnais lorsqu'il me quitte. Nombreuses sont les citations du bonheur parmi les écrivains et philosophes. Le bonheur alterne entre désir et ennui. Sur les médias sociaux, les messages sont rapides et écourtés, sinon ils n'attirent pas l'attention. Les dissertations détaillées sont moins populaires chez les internautes affublés des TikTok de ce monde. Une connaissance souffrant de bipolarité aimerais retrouver le bonheur d'antan. Paradoxalement, il l'identifie en le perdant. Le monde idéal n'existe pas chez l'homme de son vivant, il se défile rapidement. La définition du bonheur est propre à chacun. Pour certains, c'est prendre un repas entre amis, pour d'autres, la sensation grisante de jouir de la vie lors d'une ballade en forêt. Des jeunes filles hier soir affirmaient que l'éducation faisait défaut dans les établissements scolaires. À première vue, c'est leur éducation qui fait défaut. Ils sont ici pour apprendre, c'est pour ça que les participants furent indulgents envers leurs manque de discipline et surtout leurs jeunes âges. Chez les moins nantis, l'éducation fait défaut. La grand-tante qui les accompagnait, regrettait amèrement de n'avoir pas su jouir du bonheur dans sa vie. Son éducation n'a pas été à la hauteur de ses attentes, selon son témoignage. Comme ses rejetons, elle éprouve des difficultés à porter une attention rigoureuse, ne comprenant pas tout à fait les propos discuté. Et elle dira que le bonheur ne l'a jamais traversé. Le bonheur exige une présence accrue. Le bonheur exige de vivre dans l'instant présent. Nous sommes responsables en partie du bonheur qui nous affecte. L'autre partie est multifactorielle telle ; la famille transmettant les valeurs, la sécurité et la confiance en soi. La culture environnante, les éducateurs et les influences du milieu sont autant de gages à la réussite d'une vie heureuse. Le bonheur, ce n'est pas autant de désirer constamment les choses que l'on désire que de se satisfaire de ce que l'on a. Les philosophes de l'Antiquité prêchaient la simplicité volontaire. Je m'apparente à ce mouvement par la force des choses qui, désormais, font partie intégrante de ma vie. Tout m'apparaît si simple lorsque je suis capable de m'arrêter. Ce ne fut pas toujours ainsi. En ce moment de lacustre immobilité, j'éprouve un bonheur immense à écrire. J'éprouve une satisfaction de m'être réaliser pleinement et de continuer à le faire dans les tempêtes de l'existence. Mon bonheur est affecté par cette dernière citation qui affirme devoir accepter ce que l'on a et ce que l'on est. J'y travaille ardemment en voulant m'améliorer sans cesse, et ce, sans négliger le repos et le lâcher-prise indissociable au bonheur éphémère. Je préfère passer du temps avec des gens qui voient un psy qu'avec des gens qui devraient voir un psy. Depuis quelques années, je n'ai plus le temps de travailler, je suis trop occupé avec moi-même. Je récolte mon salaire autrement qu'en devise et je me sens plus riche qu'autrefois.


Les agrumes sont couverts d'amertume. Mon panier de friandises s'étiole. Je ne fredonne plus comme avant. C'est la chasse, mon arc s'est flétri, mon couvre-chef aussi. J'apparais, jaillissant de la pénombre, mes détracteurs ont disparu depuis. Vacillante bienveillance, mon passe-partout a changé d'allégresse. Je peine à retrouver mes entrailles anonymes. Lumières vives, je ferme les yeux pour m'inventer de nouvelles stratosphères. Un scintillant colibri m'est apparu, me faisant oublier mon marasme éternel. Les mots jaillissent à nouveau, plus élégants qu'autrefois. La réincarnation de l'inconnu s'arrime au pays dérisoire. Comment ferais-je pour désapprendre à penser, ainsi soit-il. La peine de n'avoir fait que passer m'indispose cruellement. Les rumeurs auront beau éclatées, je me fiche du monde entier. Éreinté du spleen excessif, je pars à la dérive dans une lascive immobilité. Transpire ta peine à la noirceur d'ici, le temps arrangera les choses. J'écris pour me rappeller d'où je viens, où je vais, laissant une légère trace dans cette mer d'indifférence. Mon rôle, quel rôle ? Un drame parodié, une comédie insipide, une tragédie sur la sottise. Lâcher prise ne signifie pas se laisser aller, j'aurai compris. Vive le vent. La tempête est à ma rescousse déposant mon ardeur à l'abri du mouvement incessant.

9 octobre |

L'art et l'amour me sauveront. En marchant dans différents quartiers, je constate la misère ambiante. Il est possible que mon regard accentue le spectacle, ne voyant que le côté sombre des choses. Dans ma jeunesse, la misère, la pauvreté et la violence des quartiers populaires était omniprésente, toutefois, les gens étaient regroupés davantage. La famille, quoique déficiente à certains égards, représentait le mortier des communautés. La religion prenait encore beaucoup de place jusqu'à sa disparition presque totale depuis deux décennies. Elle faisait parti intégrante de la société au point de l'étouffer. Lorsqu'elle a disparue ou presque, un vide s'est rapidement installé. Dans sa forme actuelle, c'était selon moi, une bonne chose. Le problème, c'est que nous avons pas su remplir le vide par quelque chose de consistant. Les liens se sont relâchés vers des valeurs individuelles, internet favorisant cet élan. À St Roch aujourd'hui, je me croyais dans un hôpital psychiatrique, tellement de gens jonchaient la rue l'air hagard et perdu. Autrefois, c'était un quartier ouvrier flamboyant. On a beau mettre de belles façades devant les édifices, que l'âme de ce quartier a déserté vers les banlieues aseptisés. En remontant dans le Vieux-Québec, j'ai l'impression de séjourner à Disney World en Floride. Que des touristes pour la plupart et quelques badauds cherchant éperdument un divertissement blafard. Les façades sont propres, les tarifs affichés aux commerces mirobolants. Ce fut jadis ce qu'on appelait le quartier latin. Je le connais bien pour y être né. En sortant du cinéma sur l'avenue Cartier avec une amie, elle me confie ne pas aimer ce carrefour. C'est pour ça qu'on est amis, parce qu'on ressens les mêmes choses. La rue est belle en effet, des gens sobres avec des airs contrariés pateaugent l'artère. Je n'y ressens pas la joie de vivre, le désir de partager avec autrui. En cela, aucuns bâtiments et lieux ne pourront compenser la chaleur humaine que dégage une communauté saine. J'y ressens la morosité. C'est pour ça que je suis bouleversé lorsque je reviens de voyage. Une voisine ayant partiellement les mêmes perceptions m'indique de faire des efforts pour voir le beau côté des choses. Elle n'a pas toujours été ainsi. Je suis perplexe, ce n'est pas d'hier. À chaque destination effectuée dans le passé, j'ai noté qu'à côté des richesses se déploie la misère. On en est venu à se raconter des histoires pour se dire qu'il y a pire que nous. Jadis, on disait qu'on était né pour un petit pain. J'ai vu déjà, dans des lieux d'une grande pauvreté de l'ailleurs, des âmes humbles et généreuses. Effectivement, je dois, tout comme ma voisine, remettre ma vision dans une objectivité plus limpide, ceci serait valable pour ma santé mentale. Il y a l'exil, mais changer mon regard serait nettement plus aisé. Peut-être que quelqu'un m'apprendra certaines choses sur la façon dont se comporte le monde, car bien souvent, je n'y comprends plus grand chose. Peut-être est-ce ainsi vieillir ; perdre ces certitudes. Et si tout revenait simple comme une lettre à la poste. Même la poste se demande si elle devient illettrée à ne voir que des colis obsolètes. Plus j'avance dans le temps, plus j'ai le goût d'écrire. L'histoire me sert d'inspiration. Je ne tenterai pas de me définir, car, comme l'amour, aussitôt qu'on commence à le définir, il disparaît. Mes principaux défis, à court terme, c'est de tenter d'harmoniser les mots de façon à ce qu'ils soient de plus en plus explicites et percutants. Je veux éblouir davantage les mots, les maîtriser, en faire une sorte de poésie contemporaine. Déjà, en utilisant le correcteur issu de l'intelligence artificielle, je n'ai plus le souci pour la ponctuation. J'éprouve ensuite, le désir de réseauter avec des gens ouverts, sympathisants et relativement compatibles avec mes champs d'intérêts. Je vais cesser mes pérégrinations pour le moment pour m'infiltrer doucement dans le bouquin sur la table.

7 octobre |

Un thème récurrent voltige dans ma tête ; le sentiment d'exclusion et de solitude. Pour passer ce profond malaise, je viens de lire Mayonnaise, roman d'Éric Plamondon qui relate la vie abrégée de Richard Brautigan sous une forme originale. Gabriel Rivages raconte ses recherches sur Brautigan sur la côte Ouest des États-Unis. Brautigan a écrit de nombreux livres et manuscrits, dont le plus célèbre fut ; la pêche à la truite en Amérique. C'est l'Amérique des sixties. Il fut le dernier des beatniks. Il s'est suicidé à 41 ans. Il fraie la poésie avec Ken Kensy dans le quartier hippie Haight-Ashbury de San Francisco, qui fut l'auteur du film mythique ; Vol au-dessus d'un nid de coucou. C'est la période éclatée et psychédélique du summer of love de 1967. Je m'intéresse à ces années pour les grands changements sociaux qu'ont initiés les jeunes générations de cette vibrante époque. Depuis, il y a eu de grands progrès culturels qui ont plafonné et, qui depuis une décennie, régressent. Je devrais me mettre aussi à la poésie contemporaine pour transformer mes vieilles rengaines, mes ruminations. Lire exerce en moi de profondes stimulations. Parfois, quelques pages suffisent pour me délié l'esprit. L'histoire la provoque. Parfois, je me sens trop rigide. J'en reviens au thème récurrent qui m'aliène, ce sentiment d'abandon et de rejet. Ces pensées provoquent en moi un blocage de ma vitalité. Du moment que j'ai détecté le signalement, que faire sinon d'avoir le sentiment d'avoir crevé ce lamentable abcès en l'exprimant ? C'est comme une tache sombre qui pigmente mes cornées que je ne peux dissoudre qu'avec beaucoup d'adrénaline. Trop longtemps dans le corps, elle épuise cette hormone. Je lis rarement des romans, pourtant je devrais. Il est inutile de me sentir obligé de justifier constamment mes opinions avec les gens. C'est une cause perdue et une perte considérable d'énergie. C'est pourquoi il y a autant de partis politiques au Québec, nous sommes les maîtres de la division. Je n'ai pas le goût à ce jeu pour m'y avoir trop souvent pris au piège. Que feront les hommes lorsque l'intelligence artificielle prendra leurs places ? Soit qu'ils deviennent les esclaves de ce qu'ils auront créé, soit qu'ils s'en serviront pour se libérer. Cela m'étonnerait, connaissant les hommes. Il faut bien s'enrichir quelque part n'est-ce pas ? À moins qu'une nouvelle supra-puissance s'élève en remplacement du cirque mirobolant de nos existences. Devrait-on dire une vie artificielle ? Difficile d'être plus superficielle que ça aujourd'hui, sans vouloir être pessimiste. L'espoir est ce qui nourrit le monde. Qu'a fait le progrès dans le monde depuis un siècle, à part technologique ? Tout n'est évidemment pas aussi sombre que je laisse le prétendre. Je lis un ouvrage magistral; le lien d'amitié, une force d'âme de Michel Erman qui m'apporte de nombreuses réponses. J'en ai besoin ces temps-ci. J'y puise la nourriture que mon esprit exige, me confirmant que j'ai besoin des autres pour exister.

6 octobre |

C'est quoi un couple ? Le désir de fonder une famille. Un accommodement économique. Répondre aux besoins de sécurité. Faire des projets communs. Partager avec quelqu'un possédant des valeurs et affinités communes l'essence même de la vie. Mes parents adoptifs ne furent pas un modèle. L'harmonie du foyer faisait défaut, j'en ai souffert. Ce fut ainsi. Mon père, je l'ai peu connu, il est mort à mes dix ans. Paul, je l'aimais bien. Ses faiblesses différaient largement de celles de Marcelle. C'était un homme profondément humain. Son but premier était sa foi, la littérature et la famille. Il s'est bien occupé de moi et de mon éducation écourtée par son absence précoce. Sa présence était joyeuse et sereine. Ma mère était possédée par le jeu compulsif. L'argent, elle ne savait qu'en faire, sauf reprendre les paris du lendemain. J'aime étudier les rapports que les gens ont les uns envers les autres, la sociologie pour bien dire. Le monde est rempli d'alliances étranges et contradictoires. Le besoin de liberté est rempli de bonne volonté, apprendre à s'en servir adéquatement est un art. On reconnaît la liberté par son absence, l'argent par son manque, la santé par la maladie. Cela aura pris deux semaines après mon retour de voyage pour reprendre mes esprits. Il est de ces déplacements qui provoquent de grands bouleversements. La plupart effectués le furent. Après coup, je ressors plus fort. La vie est composée d'essais et d'erreurs. J'ai passé ma vie dans les montagnes russes. À la retraite, ce qui compte n'est plus d'agir, mais d'être. La retraite est perçue difficilement par plusieurs qui l'ont franchie, je n'en suis pas exempt. Le lâcher-prise devient une nécessité. Au retour de mes péripéties prolongées en vanlife, je reviens anxieux. Je n'ai pas de solutions immédiates à ce constat sauf le repos. En faisant des expériences conscientes et répétées, les réponses me parviendront. On n'a pas suffisamment d'une vie pour devenir sage. J'expérimenterai l'éloge de la lenteur durant les prochaines semaines avec davantage de parcimonie. 

Mon enthousiasme est tellement grand durant les voyages qu'il vient un temps où la pente redescend brusquement vers un état dépressif au retour. Des troubles anxieux apparaissent dans un mouvement compensatoire du sentiment d'exclusion et d'une solitude involontaire. Pourtant je devrais avoir la force d'inverser cette dynamique. J'ai eu beaucoup de relations superficielles dans ma vie, je n'ai pas su faire les bons choix par manque de courage et de connaissances. Depuis, j'éprouve un bonheur immense à m'arrêter pour lire et écrire. Ces moments me permettent l'introspection nécessaire pour faire des choix distincts dans une continuation satisfaisante. Merci la vie de m'apporter la sagesse de changer ce qui m'est possible de changer et de reconnaître la différence de ce qui m'est impossible de changer. Apprendre à vivre est un art.

5 octobre |

Je croyais que mon voyage touchait à sa fin, ayant atteint l'extrême limite de mon pouvoir, que le sentier devant moi s'arrêtait et que le temps était venu de prendre retraite dans une silencieuse obscurité. Mais je découvre que ta volonté ne connait pas de fin en moi. Et quand les vieilles paroles expirent sur la langue, de nouvelles mélodies jaillissent du cœur ; et là où les vieilles pistes sont perdues, une nouvelle contrée de mon cœur découvre ses merveilles. Rabindranath Tagore. Je souhaite dans ma maison : une femme ayant sa raison, un chat parmi les livres et des amis sans lesquels je ne peux pas vivre. Guillaume Apollinaire. Après de somptueuses escapades au bout de la route qui m'ont presque fait sombrer dans la folie, je débute un long processus de douce hibernation. Je réalise que sans amis, il m'est impossible de vivre, eût-il possédé tous les biens. Je reprends en partie une citation d'Aristote. Depuis toujours, je note des citations. Ce sont mes mantras dans mes passages à vide, sinon davantage. J'ai déplacé beaucoup d'air depuis le printemps, que le temps est venu de m'immobiliser dans une singulière quiétude. Tout va trop vite autour de moi. L'actualité décline ses horreurs au quotidien laissant ses traces dans toutes les hémisphères. Je ne peux pas m'extirper du monde qui m'entoure, car je suis le monde. M'asseoir, marcher, lire, écrire redevient mes exutoires dans le déclin de la lumière automnale. La bibliothèque devient une annexe à mon logis pour apaiser mon cœur et mon esprit. J'ai perdu cette semaine, non sans peine, un être que je croyais un ami. Peut-être ne l'a-t-il jamais été ? Il fut, comme je le fus pour lui, un pèlerin de passage. Il a fait ce qui lui était possible de faire selon ses dispositions. Je le remercie pour les heures passées ensemble à discuter. Je ne dois pas tenter de comprendre, mais plutôt considérer qu'il m'a permis de faire un bout de chemin. N'est-ce pas ainsi que sont les hommes ; des pèlerins fragiles et incomplets ? Je ne ressens pas autant le désir de comprendre qu'il fut indisposé à communiquer la dernière strophe. Malgré ce que je ressens parfois, je possède ma place dans cet univers qui m'est difficile de reconnaître bien souvent ses codes abstraits. Il ne me suffit pas autant de comprendre outre mesure que de se connaître et vivre en paix. Mais pourquoi cette paix est-elle si souvent inatteignable avec tous nos savoirs et connaissances ? Ma vie est un mystère, je doute. En ce sens, je suis profondément humain. Mes doutes ne me permettent pas de vivre dans l'ignorance ni dans la paix d'esprit. Mon signe, poisson est représenté par deux poissons reliés ensemble nageant dans des directions opposées. La dualité m'assaille de toute part que je dois être vigilant pour canaliser mes énergies. Toutefois, je ne dois pas mélanger l'action du savoir. Qu'en est-il du savoir ? Aujourd'hui, il est relié au nombre d'informations diverses emmagasinées. En aucun cas, la sagesse n'intervient dans ce lot de codes abstraits interrompus. Le lien d'amitié est une force d'âme, ce qui vient alimenter mes réflexions en cette période stérile axée sur la peur, l'ignorance, la performance et l'apparence dans cette culture dont je ne peux me soustraire. Être seul ce n'est pas être indépendant, c'est tout sauf ça. Chez les amérindiens autrefois, un indien seul c'est un indien mort.

2 octobre |

Durant les derniers mois, mon regard s'est porté vers l'extérieur. C'est comme ça le printemps et l'été. J'ai beaucoup discuté sur l'état du monde les derniers temps. Il se porte mal. Maintenant, je dois porter mon regard vers moi et sur ce qu'il m'est possible d'effectuer pour améliorer mon sort et m'épanouir. Il est impératif de reprendre le flux de mes énergies en refaisant le point sur ma vie. Je suis submergé d'émotions ces temps-ci, au point d'avoir la nécessité de parler ailleurs que dans le blogue. Je prends les moyens nécessaires pour éviter tous débordements émotifs pouvant obstrués mon esprit. Les interactions de qualité me manquent. Par cela, je veux dire des relations amicales et engagées malgré que j'ai la chance d'avoir la présence d'une amie sincère. J'ai négligé une partie importante de ma dynamique dans le fait d'avoir passé trop de temps en solitaire les derniers mois sur la route. Je fais ce constat par des malaises récurrents et pernicieux depuis quelque temps. Cela m'arrive après l'été lorsque je rentre dans mon habitat qui me sert de cocon. Ayant passé près de quinze semaines à l'intérieur d'un petit habitacle motorisé, ce fut intense et mouvementé. Ce mouvement frénétique ressemble à une fugue associée à un désir d'assouvir un besoin d'évasion et de découvertes. J'ai appris de la vie qu'elle est remplie de deuils, je m'y habitue difficilement. Des amitiés se défont, des projets arrivent à terme, une immense lassitude me porte dans une profonde remise en question. Le fait de me sentir impuissant devant les choix proposés est inconfortable, surtout que je peine à reconnaître les meilleurs. Il est probable que mes yeux ou mon cœur soient fermés pour ne pas voir ce qui est bon pour moi. L'inconfort devant mes peurs m'apparaît brutalement. Je ne suis pas un être négatif, loin de là, mais attéré devant les éternels recommencements. J'ai souvent le sentiment de faire du surplace, revivant en boucle les mêmes vieilles rengaines issues de blessures ancestrales. Je suis fort et fragile à la fois. Mon besoin de m'exprimer aujourd'hui est grand, à l'image de l'eau se remplissant devant le barrage inadéquat. Mon besoin d'authenticité détonne devant des gestes mécaniques. J'ai accordé, cet été, beaucoup d'intérêts à des choses extérieures. Sans les échanges nourrissants empreints de compassion et d'ouverture, ma vie est stérile. Je sais qu'en ce moment, j'ouvre une porte menant sur différentes avenues qu'il n'est pas aisé de partager. Les émotions sont vives que j'esquiverai de poursuivre le prochain chapitre.

29 septembre |

Le carrefour est un lieu sacré. C'est là que le pèlerin doit prendre une décision. Là où les routes se croisent, deux grandes énergies se concentrent - le chemin que l'on va choisir, et celui que l'on abandonné. Tous deux ne font plus qu'un, mais seulement pour une courte période. Le pèlerin peut se reposer et dormir un peu. Il ne peut y demeurer pour toujours : lorsque son choix est fait, il doit poursuivre sa route, sans pensé à la voie qu'il a délaissée, sinon le carrefour devient une malédiction. Maktub, Paolo Coelho. Les retours de voyages me sont douloureux. Je ne reviens jamais le même. Le vide à un moment donné m'accapare de façon douloureuse. Le mouvement excessif m'accable, l'immobilité m'angoisse. Le voyage, c'est l'évasion, même de la discipline à soi. C'est la grande débâcle. Le retour vers l'intérieur devient nécessaire, pas qu'en voyageant je m'oublie, mais je suis davantage préoccupé du monde qui m'entoure. En ville, je joins les rangs de la morosité et de l'indifférence de mon quartier. J'ai besoin de reprendre mon souffle, de m'immobiliser pour repartir sur la prochaine voie. Vivre sur un carrefour peut devenir épuisant. Durant le voyage, je suis une trajectoire inconstante, réelle mais importante. Le retour est inconfortable, c'est dans l'acceptation de ce malaise que subsistera mon salut.